Les Demoiselles de Beaune

Publié le par Martine

Les Demoiselles de Beaune

Ouvrir un roman signé Karine Lebert est toujours source de plaisir. Le dernier en date, paru à nouveau aux Presses de la Cité, collection Terres de France, ne fait pas exception à la règle et, même, la confirme bien joliment.

En cette fin de première moitié du 15e siècle, Balbine Haubenois n'est encore qu'une enfant lorsqu'elle assiste, aux côtés de sa mère Marguerite et de son père Achille, à l'inauguration des Hospices de Beaune en Bourgogne, tels que les ont souhaités Dame Guigone de Salins et son époux, le chancelier Nicolas Rolin. Pourtant, en ce 4 août 1443, la fillette âgée de 7 ans, se promet qu'elle mettra sa vie au service des malades et des nécessiteux dans cet établissement de soins. 

Mais ce destin qu'elle imagine tout tracé risque fort d'être compromis lorsque Balbine a confirmation de ce qu'elle supposait. Achille n'est pas son père biologique. Elle est la fille de Charles de Joinville, premier époux de Marguerite, fils des seigneurs du château voisin qui n'ont jamais accepté ce mariage, et décédé lorsque Balbine n'était encore qu'un bébé. Les parents de Charles venant également de trépasser, c'est de la bouche du jeune frère de Charles, Guillaume de Joinville, que la fillette apprend cette lignée. Etant la seule descendante directe de la famille seigneuriale, Balbine a désormais toute sa place au château.

Elle attendra cependant d'avoir 16 ans avant d'y effectuer une première visite et d'y rencontrer le reste de sa famille paternelle : son oncle Audouin et son épouse Hermione qui ne peut lui donner d'enfant. Et si elle s'entend de suite assez bien avec Guillaume et Hermione, il n'en va pas de même avec Audouin, dont les regards et l'attitude plus qu'équivoques à son égard lui laissent une impression de malaise et de peur. Et malgré toutes ses tentatives pour ne pas se trouver seule en sa présence, le drame survient. Audouin l'agresse violemment.

Au traumatisme du viol subi, la honte et bientôt l'inquiétude s'ajoutent quand Balbine comprend qu'elle est enceinte. Ayant confié son drame à sa mère, la jeune fille accouche dans le plus grand secret et confie Jeanne, son enfant, à une nourrice chez qui elle pourra toujours venir la voir et la rechercher si elle le souhaite. Mais en attendant, c'est sur la base d'un pieux mensonge que Balbine entre enfin aux hospices de Beaune, revêtant le vêtement blanc des soeurs soignantes, alors qu'elle n'est plus une pure jeune fille.

Les années passent. Guillaume de Joinville se marie, devient père de la petite Alix. Audouin décède brutalement. Et Balbine décide d'emmener Jeanne au château afin de la mettre au service de la jeune Alix. Dès lors leurs destinées deviennent étroitement liées, basées sur ce secret lié à la naissance de Jeanne, héritière, sans le savoir, de la famille de Joinville. Un secret qui doit le rester à tout prix. Mais est-ce seulement possible? Le destin, toujours lui, n'a pas dit son dernier mot...

C'est une véritable saga de près de 400 pages que nous livre Karine Lebert avec ce roman des "Demoiselles de Beaune". 

C'est d'abord une formidable fresque historique, L'Histoire de ces fameux hospices de Beaune vécue par la petite histoire de Balbine, de sa fille et de sa cousine. Grâce aux recherches très documentées de l'auteur, on s'imprègne très facilement de cette atmosphère particulière, des us et coutumes en place dans le Royaume de France et le Duché de Bourgogne, non encore réunis. Le rôle imposé aux femmes et la triste place qui leur est attribuée, le sort dramatique réservé aux homosexuels (et qui, hélas, semble encore avoir cours de nos jours dans certains pays du monde), l'engagement religieux, la vie du peuple et de ses seigneurs, tout est propice à moult détails et précisions qui apportent d'autant plus d'authenticité à ce récit.

Les sentiments, les émotions ne sont pas en reste. Dans les destins tout tracés d'Alix et de Jeanne (même si celui de cette dernière va prendre une orientation totalement inattendue). Mais surtout dans la douce et troublante histoire d'amour qui va unir Balbine au médecin, Maric Lambert. Ces émotions, ces sentiments, Karine Lebert les évoque avec une grande justesse et, là encore, nous rappelle combien l'amour avait peu d'importance à cette époque face aux traditions et usages ancestraux quasi immuables et, surtout, face à l'engagement moral proche du sacrifice, en vigueur alors.

"Les Demoiselles de Beaune", un excellent roman, captivant, à découvrir pour son histoire, pour sa leçon d'Histoire, pour s'instruire et pour le plaisir, tout simplement.

 

 

Les Demoiselles de Beaune
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
P
Je ne connais pas l'auteure, mais une fresque historique, ça ne peut que m'intéresser.<br /> Bon weekend.
Répondre
M
J'espère que tu l'aimeras autant que moi! Pour moi, ce roman est une belle réussite! Merci Philippe! Bon week-end!
B
Quel excellent roman en effet ! Une belle chronique Martine que je m'empresse de partager sur ma page facebook. Je vais très bientôt en parler aussi.<br /> Que ces romans dit "terroir" peuvent nous apporter beaucoup que ce soit sur les faits historiques et la vie en général. Ils méritent vraiment d'être mis à l'honneur ! Et ce, de plus en plus !<br /> Je te souhaite un agréable week-end Martine et je t'embrasse très fort.<br /> Bernadette.
Répondre
M
Merci beaucoup pour ton partage, Bernadette! Ce roman de Karine Lebert est excellet et très réussi! Je me suis vraiment régalée et je suis sûre que tu l'aimeras autant que moi. Je te souhaite un très bon week-end et je t'embrasse très fort