La lanterne des morts

Publié le par Martine

La lanterne des morts

Ouvrir un roman de Janine Boissard est toujours, pour moi, promesse d'une belle lecture. Son nouveau "La lanterne des morts" paru chez Fayard, confirme cet adage personnel de bien jolie manière. 

Cette fois-ci, c'est dans le Périgord Noir, que l'auteur a situé son histoire. A Terrasson-Lavilledieu, à proximité de Brive (où Janine Boissard se rend très régulièrement à l'occasion de son célèbre salon du livre). C'est dans cette petite ville que vivent Lila, Adèle et leurs parents, Charles et Madeleine Mercoeur. Charles est trufficulteur, avec ses chiens (et en particulier Jacquot) il repère le fameux diamant noir et fait vivre sa famille de cette culture. Madeleine est femme au foyer et gère l'intendance familiale tout en s'occupant de l'éducation de ses filles : Lila, belle jeune fille de 14 ans, et Adèle, sa cadette de 7 ans, un peu plus "ordinaire". Deux ombres ternissent ce tableau familial idyllique : Madeleine est diabétique et doit suivre un régime particulier et des menus adaptés qu'elle se compose elle-même, et Lila souffre de bipolarité, tantôt radieuse, adorable, enthousiaste, optimiste, tantôt renfrognée, repliée sur elle-même et ses idées noires, pessimiste, en voulant au monde entier.
Et justement, lorsque commence ce roman, c'est l'anniversaire d'Adèle. La famille le fête joyeusement, Madeleine évitant cependant de partager le gâteau et s'étant préparée un dessert maison. Pourtant, ce jour-là, elle ne se sent pas bien et préfère se reposer au lieu d'accompagner son mari et ses filles en promenade. Et le drame qui survient alors, quand ils la découvrent inanimée dans sa cuisine, est d'autant plus brutal et incompréhensible aux yeux d'Adèle lorsque sa mère décède d'une intoxication alimentaire en fin de journée.

Tante Mahaut, soeur aînée de Charles, célibataire sans enfant et proviseur d'un lycée à Bordeaux, appelée au secours, prend de suite les choses en main et, en accord avec son frère, décide d'accueillir Lila chez elle, le temps de lui laisser finir ses études. Et c'est tout naturellement qu'Adèle se rapproche encore plus de Vivien, fils benjamin de ses voisins propriétaires vignerons, plus proche en âge de Lila que d'elle, pour qui cependant elle nourrit un tendre sentiment teinté d'affection fraternelle.

Les années s'écoulent. Lila tombe amoureuse de Damian, se marie et part vivre avec lui en Espagne auprès de sa riche famille. Adèle grandit, devient une charmante jeune fille, jeune femme. Son affection pour Vivien grandit d'autant et se mue en un sentiment plus fort. Mais, lorsque, après le décès subit de Damian, Lila revient à Terrasson, dans sa propriété familiale, le jeune homme semble à nouveau subjugué par la belle. Malgré certaines situations qui surviennent alors et malgré les questions que se pose, très vite, Adèle. Qu'a fait Lila pendant toutes ces années? Pourquoi n'a-t-elle jamais répondu aux appels et courriers de sa soeur la suppliant de revenir pour partager les derniers jours de leur père? Et pourquoi Jacquot, ce chien si cher au coeur d'Adèle, meurt-il lui aussi d'une intoxication alimentaire?

Toutes les réponses à ces questions, la jeune femme va devoir les trouver, aidée en cela par tante Mahaut et Vivien qui vient enfin d'ouvrir les yeux, et ses bras à Adèle. Mais n'est-ce pas déjà trop tard? 

Avec la belle écriture, tendre et savoureuse qui la caractérise, Janine Boissard nous offre ici un roman bouleversant, terriblement attachant et doté d'un suspense grandissant. La bipolarité de Lila y est abordée avec tact et délicatesse, pointant du doigt les causes et effets de cette terrible maladie qui fait tellement de mal à la fois à celui ou celle qui la subit et à celles et ceux qui l'entourent. Les traitements qui peuvent aider à la supporter, à vivre avec, y sont évoqués avec justesse, démontrant leur utilité et les conséquences, néfastes forcément, que tout arrêt intempestif peut provoquer.

Et à coté de cela, il y a l'histoire de cette famille, unie malgré tout, malgré ce drame qui s'abat sur elle, malgré les difficultés, malgré les interrogations, et malgré les soupçons qui s'insinuent, s'imposent, se concrétisent. Et puis je n'oublie pas la belle histoire d'amour entre Adèle et Vivien, qui se dévoile peu à peu, sous nos yeux émus, dans la bienveillance, l'attention portée à l'autre, cette délicatesse que Janine Boissard sait si bien décrire et nous faire apprécier à sa juste valeur.

Et puis encore, il y a cette région, ce Périgord Noir, où l'auteur nous invite et qu'on découvre avec plaisir sous sa plume instruite et documentée. Et ces métiers "de la terre", que ce soit la trufficulture ou la viticulture, dont Janine Boissard nous enseigne la beauté et le savoir-faire, avec grand talent, nous faisant respirer, toucher, sentir au plus près l'amour que ces hommes et femmes éprouvent pour leur métier, des professions qu'ils exercent dans le plus grand respect. 

Pour toutes ces raisons (et d'autres encore), j'ai aimé ce roman sensible, à la fois moderne dans les différents thèmes qu'il aborde et traditionnel.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
P
Je ne sais plus si j'ai déjà lu cette auteure. Celui-ci n'a pas l'air mal.<br /> Bon 1er mai.
Répondre
M
Il est même très bien (pour moi!!!) Merci Philippe! Bonne lecture, j'espère!